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    Soudain, une fumée légère envahit la pièce. Elle éclatait en lunules crochues sur le sol froid et métallique, s'agglutinant en vapeurs légères et blanches qui s'insinuaient le long de leurs habits pour s'immiscer vers les narines, brouillant leurs idées déjà bien obscurcies et annihilant toute volonté.....

     

    En reprenant leurs esprits, ils prirent aussi conscience de leur environnement. Ils se trouvaient en pleine nature, une nature faite de sable à perte de vue. Le vaisseau comme le voilier avaient disparu. Au loin, le soleil se couchait, dévorant l'horizon en un immense brasier. Bientôt, le crépuscule les plongea dans une semi obscurité balayant l'horizon en ombre chinoise et où la seule lumière était nappée de tons bleutés dans un firmament à l'infini étoilé.

    La température baissait rapidement. Leurs habits, spécifiques aux bédouins n'allaient pas les protéger longtemps.  Ils portaient des vêtements amples blancs couvrant la peau mais permettant au vent de s'engouffrer afin de rafraîchir le corps ; ils étaient coiffés d'un Keffieh, un large foulard qui, placé sur la tête était maintenu en place par une corde rigide appelée Agal, ce qui les protégeait d'un éventuel vent de sable ; mais, pour l'heure, ce qui importait, c'était de se protéger contre le froid qui s'installait peu à peu depuis que le soleil avait regagné l'horizon.

     

    Richard avança :

     

    -Tout le monde va bien ? Mai ? Moon ? Chris ?

     

    Après avoir été rassuré sur leur état, Richard monta en haut d'une dune qui surplombait les autres et ce qu'il vit le stupéfia.

    A peine fut-il remis de sa vision que, tout près de lui, un homme se matérialisa. Il fit un bond en arrière et déséquilibré, chuta lourdement sur le sol, heureusement sans conséquence vue sa consistance. L'homme s'approcha pour le relever. Il était très grand, presque sept pieds. D'un âge avancé, il avait de longs cheveux blancs qui tombaient sur les épaules. Son visage caucasien était d'une douceur extraordinaire et inspirait le respect et la confiance. La main tendue, il attendait.

     

    -Venez mon ami, soyez sans crainte, je ne vous mangerais pas...ce n'est que ma main.... ironisa-t-il en le ramenant à la verticale.

    Sa voix était claire, extraordinairement douce. Richard fut surpris aussi par sa poigne ferme et sa force, inhabituelle pour son apparence qu'il estimait octogénaire. Derrière lui, ses trois compagnons restaient en contrebas, figés par l'apparition soudaine de l'inconnu.

     

    Bientôt, ils se retrouvèrent tous assis en rond entre deux dunes et devant un bon feu de bois sorti de je ne sais où. Mais qu'importait, ils retrouvaient avec la chaleur figure humaine.

     

    Anticipant leurs questions, il se présenta et satisfait aux interrogations que les quatre aventuriers se posaient depuis leur enlèvement.

     

     

     


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    L'Amour Éternel...existe-t-il ? ...son immatérialité...sa survie au-delà de la vie...dans la mort...est-ce un mythe ? une gageure du pragmatisme ?

     

    .....Peut-être ce que Victor Hugo a écrit à Adèle Fouchet, dans la nuit du 20 octobre 1821, dans ses « lettres à la fiancée »...


    je cite :

     

    L'Amour immatériel est éternel parce que l'être qui l'éprouve ne peut mourir. Ce sont nos âmes qui s'aiment et non nos corps.

     

    Se faire une idée vraie ou une idée fausse sur la question équivaut à savoir si cette idée peut être utile ou non... mais n'allons pas plus loin, nous serions alors en plein débat philosophique et comme à son habitude, cela risque de durer plusieurs heures sans en connaître forcement la réponse.

     

    Non, ce que je voulais vous dire est bien plus simple et plus intime.

     

    Le lundi 29 août de l'an de grâce 88, j'ai reçu une lettre de ma compagne dans laquelle il était rédigé ce poème de Dante Gabriel Rossetti. Je laisse, à votre bon vouloir, le plaisir d'en déguster les mots et, en fermant les yeux, d'en déduire, qu'après tout, c'est peut-être cela.....L'Amour Éternel.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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    Figés tels des statues, les quatre aventuriers du voilier regardaient l'immense triangle d'acier glisser au dessus d'eux, les accompagnant sur cette mer d'huile, comme si le temps s'était arrêté. Un sifflement continu, presque inaudible, en ultrason, sortit soudain de l'intérieur du vaisseau les enveloppa tout entier et ils s'affaissèrent sur le pont, inconscients.

    Lorsque Richard rouvrit les yeux, comme à travers un brouillard, il était dans une salle si faiblement éclairée qu'il écarquilla les yeux tout en balayant l'espace de son bras qu'il eut du mal à bouger. Une légère effervescence régnait autour de lui. Une silhouette floue évoluait dans cet endroit inconnu, tout près de lui, qu' il n'arrivait pas à discerner distinctement. Il entendit quelqu'un parler sans comprendre les paroles mais il s'aperçut que c'était sa propre voix qui émettait ces sons feutrés et déformés comme sur une bande magnétique...

     

    Soudain, un visage se pencha sur lui. Instinctivement, il recula mais il se heurta durement à une surface plane, froide ce qui lui arracha un léger miaulement qui eut le mérite de le surprendre et de le réveiller totalement. Il reconnut Mai.

     

    -Tu es revenu parmi nous...mon bel aventurier ?....dit-elle.

     

    Mais il avait du mal à reconnaître sa voix.

     

    -Que se passe-t-il ? Où sommes nous ? Chris ? Moon ? émit-il....des fluctuations orales presque incompréhensibles

     

    -Tout doux Richard....on est là !

     

    répondirent deux voix, sur sa droite, qui semblaient venir d'outre-tombe.

     

    Il essaya de se lever mais son corps semblait peser une tonne. Il pensa dans son for intérieur qu'il devait être salement amoché pour ne pas pouvoir s'élever à la verticale. A cette pensée, Il s'énerva un instant mais il eut beau gesticuler, il avait toujours du mal à bouger. De guerre lasse, il abandonna...

     

    pour l'instant...pensa t-il.

     

     

     

    Alors, il prit conscience de son environnement.

     

    Ils étaient dans une grande pièce, d'une vingtaine de mètres carrés, froide d'aspect, totalement vide, sans aspérités, sans décoration.

     

    Il vit Mai, assise à côté de lui, qui le regardait, légèrement effrayée. Chris et Moon étaient de l'autre côté de la pièce, blottis l'un contre l'autre. Il voulut les rejoindre mais sans succès, comme collé à ce revêtement glacé.

     

    -C'est inutile Richard ! J'ai essayé ! On doit être dans un compartiment régi par la pesanteur, c'est la raison pour laquelle notre corps semble peser une tonne et nous force à l'immobilité....

     

     

     

    Sa voix lui parvenait par pulsions, légèrement étirée, déformée. Il fallait faire un gros effort pour recoller ses mots en une phrase cohérente et accessible.

     

    Soudain, Richard comprit tout. Il était allé voir une conférence scientifique un jour sur la gravité, la pesanteur et le temps qui s'y rattache. Ils se trouvaient dans une pièce du vaisseau inconnu à forte gravité où le temps s'écoulait plus lentement d'où la conséquence d'une voix déformée, ralentie temporellement.

     

    Mais leurs ravisseurs......qui étaient-ils ? Et surtout...de quoi avaient-ils l'air ? Il avait bien une petite idée mais......

     


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  • L'été de la peur VI

     

     

     

     

    Un jour de traversée de La Sonde ; la brise vient du sud-est, apaisante comme une main de marraine. L'ennui s'installe déjà dans le cockpit. Les filles sont allongées sur leur couchette. Chris est sur le pont, adossé à l'hiloire, le regard perdu dans l'immensité des étoiles. Difficile de faire plus calme après un tangage des plus houleux à proximité du détroit de Jakarta, apaisé par un alizée venu de l'embouchure de l'Océan Indien, après avoir dépassé l'île de Sanghyang. Un léger roulis ponctué de bruissements rassurants berce maintenant le voilier et semble agir sur leur mental, favorisant l'endormissement.

     

     

     

    La mer est d'huile. La lune diffuse des poissons d'argent en éclaboussures sur la crête des vagues. La main sur la bôme, Richard se plaît à contempler cet espace tranquille et apaisant. Il réprime un bâillement. Ils sont en plein équateur.

     

     

     

    Soudain, Chris bondit, tel un clown issu de sa boîte.

     

     

     

    -Richard !!....frangin !.. répète-t-il avec une voix plus étouffée en désignant le ciel.

     

     

     

    Richard, en tournant la tête, aperçoit l'espace autour de lui qui s'obscurcit ; il lève un regard qui se heurte à une masse sombre au dessus d'eux, une masse qui semble s'étendre, dévorant les paillettes d'argent à mesure qu'elle avance. Pas un bruit. Un silence de mort. La masse inquiétante glisse doucement le long du pont. Richard frissonne. Des réminiscences s'imposent en lui. Il sait en cet instant qu'il a déjà vécu ça...un souvenir qu'il avait presque oublié....

     

     

     

    1977, année de tous les dangers... Richard retrouve un épisode de sa vie où son esprit cartésien a ressenti une semblable émotion. Il était parti de Boston pour regagner une succursale de son journal à Chicago. L'appareil s'était stabilisé à 10000 mètres et trouvé sa vitesse de croisière lorsqu'il fut secoué comme victime de trous d'air, du moins le croyait-il. En se penchant vers le hublot, il aperçut des boules de lumière intense en formation anarchique, se déplaçant à très grande vitesse autour de l'appareil. Ces objets semblaient scanner l'intérieur du 747. L'une d'elles s'approcha tout près du hublot où se tenait Richard, tournoya un instant et disparut en un éclair. Ce dernier s'écria tout haut :

     

     

     

    ....je sais que je ne suis pas très beau...mais quand même, de là à s'enfuir en courant.....

     

     

     

    ce qui eut pour effet de dérider l'atmosphère autour de lui et chacun se prit à rire de cette amusante conclusion.

     

     

     

    Lors de l'atterrissage, le reporter se mit en quête des pilotes. Beaucoup de questions trottaient dans sa tête et il voulait en avoir le cœur net. Bien entendu, ces derniers furent en pleine et totale dénégation et ils abrégèrent le dialogue. Cependant, Richard, fin psychologue, ne fut pas dupe de leur volonté de concert, à cacher ce fait divers.... Il les comprenait aisément. Un tel témoignage...et ces anomalies, fussent-elles vraies ou farfelues, ne pouvait que nuire à leur futur avancement.

     

     

     

    Or, ce qu'il ignorait, c'est que les aiguilleurs du ciel de Boston en relation avec les pilotes lors du vol avaient décelé ces mystérieuses boules lumineuses sur leurs écrans de contrôle.....

     

    Mais à quoi bon chercher plus loin...

     

    Richard apprit bien plus tard que l'Armée de l'Air en partenariat avec la C.I.A et sur les ordres de la NSA avaient imposé leur veto, récupéré l' information et classé l 'affaire du Boeing 747 sans suite, prétextant comme origine, des phénomènes banals et naturels....comme d'habitude.

     

    Aussi, ne chercha-t-il pas à explorer plus profondément la question et tint pour acquit la conclusion de l'Armée.

     

     

     

    Pourtant, le reporter n'était pas né de la dernière pluie. Son expérience, ses différentes relations avec des personnes influentes, faisaient qu'il arrivait toujours à connaître un semblant de vérité dans tous les domaines liés à l'inexplicable et ce, même s'il demeurait un indécrottable sceptique......

     

     

     

    jusqu'à aujourd'hui où, lors d'un périple maritime autour des îles indonésiennes, il venait d'être mis en présence d'un objet volant.... à priori non identifié.

     

     

     


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    Pelabuhan Sape, gros village de pécheurs, était situé à l'extrémité est de Sunbawa. Le temps avait radicalement changé depuis leur incursion sur Komodo. La mer avait été capricieuse, alternant calme et furie ; louvoyer entre ces îles de la Sonde n'avait pas été une mince affaire, aussi c'est avec un certain plaisir que nos quatre aventuriers avaient pu gagner la grande baie de Sape en un seul morceau. En fait, Richard en avait fait l'expérience quelques années auparavant en se rendant à Bali. Il avait dû naviguer ferme pour s'y rendre, essuyant tempête sur tempête dans une mer considérée comme la plus dangereuse au monde....il avait oublié. Il avait une excuse. Le séjour à Bali avait largement compensé les moments pénibles qu'il avait dû endurer pour se rendre dans cette île magnifique....un peu magique.

     

    A peine débarqués, ils s'étaient mis à la recherche d'un point d'asile afin de pouvoir manger et dormir mais ce fut peine perdue. Un terminal ferry était en construction et la civilisation avait de la peine à s'incruster dans cette région reculée. Aussi, en désespoir de cause, ils avaient regagné le voilier et après un frugal repas, avaient rejoint les bras de Morphée, exténués par les événements de la journée.

     

    Le lendemain matin, le soleil avait, à travers le hublot, trouvé son chemin, inondant de ses rayons déjà chauds, la chevelure de Mai, encore lovée sur la couchette. Richard, quant à lui, était levé depuis l'aube et une bonne odeur de café, d'omelette et de pancakes avait envahi la coursive du bateau, ce qui eut pour effet de réveiller le reste de la troupe.

     Un quart d'heure plus tard, nos quatre aventuriers étaient attablés dans la cabine principale, ingurgitant en silence un copieux petit déjeuner. L'atmosphère était pesante. Les deux mâles avaient essuyé un refus catégorique lorsqu'ils avaient voulu entamer les préliminaires d'un petit câlin..... La vengeance était un plat qui se mangeait froid chez nos jeunes eurasiennes.....et si c'était compréhensible pour elles, ça ne l'était pas forcément pour eux, trouvant l'épisode de Komodo plutôt excitant et dangereusement addictif.

     

    Ce fut Chris qui brisa le silence.

     

    -Bon !.....que fait-on aujourd'hui ? On va sur mon île ?...ou on rentre......

     

    Au bout de quelques minutes, l'avis était partagé mais non conciliable... Comme il fallait s'en douter, les filles voulaient rentrer. Jade manquait à Mai et Moon était accro......à la civilisation après l'épisode de la veille. Quant aux hommes, ils n'avaient pas eu leur mot à dire, car ne dit-on pas....Ce que femme veut...Dieu le veut ?

     

    Le temps avait changé en fin de matinée lorsqu'ils avaient repris la mer. Ils avaient suivi la côte à bonne distance afin d'éviter les récifs et étaient remonté vers l'ouest, vers Bali et Jakarta afin de gagner Singapour, le point de ralliement des Desmond lorsque les affaires tournaient mal....plus de deux mille kilomètres...un peu plus de onze cents milles....Il pouvait s'en passer des choses........

     

     

     

     

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    Durant les premiers mètres, Richard remontait fréquemment à la surface afin de guetter le varan. Il savait que ce monstre surgi du passé pouvait être très rapide et la moindre inattention pouvait leur être fatale mais ce dernier restait fixé sur la plage, fouillant de sa longue langue son propre espace.

     

    A mesure qu'il se rapprochait du bâteau, Richard se sentait plus rassuré. Les autres avaient presque rejoint le Fulmar. Il continua à assurer sa brasse en profondeur.  A quelques mètres de la poupe, il remonta à l'air libre et jeta un dernier coup d’œil vers l'île. Un frisson le parcourut....le varan avait disparu.

     

     

    Mai et Moon avaient déjà gagné le pont. Chris s'apprêtait à les rejoindre lorsque Richard aperçut un sillon anormal à une vingtaine de mètres de lui. Il se laissa couler et aperçut distinctement l'ombre du varan qui s'approchait en louvoyant rapidement vers lui. Instinctivement, il serra le manche de son long couteau, se positionna, s'apprêtant à vendre chèrement sa vie lorsqu'un fait inattendu se produisit. La varan se trouva projeté en l'air comme par magie...mais la magie avait un nom, un requin et pas des moindres, un magnifique blanc. A titre de comparaison avec le reptile, Richard l'évalua à plus de cinq mètres. Il était gigantesque. Pas question de rester dans l'eau afin d'être l'arbitre d'un combat qui ne le concernait plus et qui allait être titanesque.

     

    Il gagna en quelques secondes l'échelle de coupée et monta sur le pont sans se retourner. Ce n'est qu'une fois dessus qu'il se retourna vers l'arène liquide. L'eau s'agitait tel un maelstrom, bouillonnante, remplie d'écume. La queue du varan fouettait l'élément dans tous les sens. Le squale avait refermé son énorme mâchoire sur sa gorge et le secouait comme un prunier. Richard ressentit plein de frissons le long de sa colonne. Il n'aurait pas voulu s'attaquer ni à l'un ni à l'autre dans cet élément qui n'était pas forcément le sien par nature.

     

    Ce qu'il ne comprenait pas, c'était comment un carcharodon de cette dimension avait pu gagner le chenal, connaissant le peu de tirant d'eau du croiseur.....néanmoins il remerciait le ciel qu'il l'eut fait.

     

    -Je pense qu'il s'est trouvé piégé dans ce chenal et n'a pas pu regagné la haute mer. C'est je crois la raison de sa présence ici...fit Chris, anticipant la question.

     

    Le frère de Richard avait cette particularité, cette faculté extraordinaire de venir à l'encontre des questions que se posait sur l'instant son frère comme une suite logique à ses interrogations, un lien indéfectible et spirituel souvent propre à la gémellité...mais ils n'étaient pas jumeaux, loin de là puisque sept années les séparaient...sept ans de réflexion avait dit leur père à la naissance de Chris.

     

    -Tu me l'enlèves de la bouche....se contenta de dire Richard comme pour clore le problème.

     

    Une heure plus tard, ils avaient atteint la haute mer et l'épisode de Komodo n'était plus qu'une vieille histoire....sauf pour leurs compagnes encore sous le coup de l'émotion...et très rancunières.

     

    En définitive, ils avaient décidé de rejoindre Sapé, histoire de calmer le jeu avant de continuer l'aventure vers Florès...si d'aventure, les filles revenaient sur leur décision de gagner la civilisation......

     

     

     

     

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    L'été de la peur 3

     

     

     

    Nous abordons l'archipel par vent de travers, un ris dans la grand voile. Le croiseur frappe l'écume. Le cap est encore invisible sous l'horizon et malgré une légère déclinaison du compas, nous sommes sur la bonne route. La mer change de ton, prend l'aspect d'une muraille d'un bleu foncé dans laquelle nous plongeons jusqu'à nous laisser porter dans une eau plus calme. L'après midi est bien entamée. Le Fulmar flotte maintenant sur une mer aussi plate qu'une paume de main, tirant des bords à travers un chapelet d'îlots d'aspect hostiles, recouverts d'une végétation verte, touffue mais remplie de chants d'oiseaux.

     

     

     

    L'île qui nous intéresse apparaît bientôt au détour d'un chenal. A sa seule vue, les filles appuyées sur le pataras frissonnent. Aucun son n'en sort. Pas le moindre signe de vie. Atmosphère troublante...angoissante perspective d'intrusion dans une végétation aussi dense que lugubre...Chris et Richard se regardent, le visage grave et après une seconde d'appréhension vite refrénée jettent l'ancre à quelques encablures d'une crique sablonneuse. Ils sont arrivés....autant continuer...pensent-ils.

     

     

     

    Mai a soudain une pensée pour Jade...dans quelle galère, les hommes allaient-ils les emmener ? Moon a reculé jusqu'au grand mât...elle ne sent pas cette aventure. Elle semble tétanisée, a du mal à respirer tant l'angoisse qui l'étreint la paralyse. Chris, la voyant si pâle, lui parle à l'oreille doucement, la rassure mais son regard ne fait pas de doute, il lui faudra du temps.....ou peut-être pas....

     

     

     

    Après avoir tiré le dinghy sur la plage, les deux couples s'enfoncèrent dans l'épaisse et inquiétante végétation. Les filles ne purent retenir un frisson.......

     

     

    Maintenant....imaginez le décor...une coupole qui semble les engloutir, d'un vert profond...où le soleil n'est jamais parvenu, grouillante de vie mais aux sons inaudibles ...c'est si touffu que Chris, placé en tête et déjà en sueur manie la machette avec force pour se frayer un chemin à travers un espace à sa mesure...sans plus. Le sol s'enfonce à chaque pas de la colonne, rempli d'humus détrempé par l'humidité constante qui a plaqué violemment dés l'intrusion chaque vêtement comme une seconde peau, serré leur gorge dans un étau et rendu leur respiration difficile...

     

     

     

    Imaginez des centaines d'yeux à l 'appartenance invisible qui vous scrutent, guettant vos moindres gestes, attendant le moment propice pour vous faire regretter d'avoir empiété sur leur territoire et d'avoir violé leur douillet et inextricable environnement..... Personne ne dit mot. On sent la tension monter. Richard regrette déjà d'avoir emmené les filles....c'est vraiment horrible cette sensation de mal être qui enserre la gorge...angoissante cette atmosphère qui bloque leur respiration rendant leur avancée pénible....et difficilement soutenable...

     

    Il ferme et soutient la marche comme pour recadrer l'ensemble, rectifiant les faux pas, écartant les branches rebelles laissés par Chris et la nuée d'insectes qui s'emmêlent dans la chevelure des filles et qu'elles balaient d'un revers et futile revers de main......

     

     

     

    Les minutes passent et ils n'ont avancé que de quelques mètres. Chris semble épuisé par sa lutte avec la nature du lieu. On sent qu'il regrette son choix aventureux mais n'en laisse rien paraître. Il coupe, taille, se fraie un passage dans cet environnement hostile et séculaire....

     

    Soudain, un coin de ciel bleu apparaît dans la canopée. La végétation devient moins dense et bientôt, ils pénètrent dans une savane aux hautes herbes. Ils s'arrêtent un instant. Le vent venant du large, enjambant la jungle balaie l'espace créant des ondulations perfides dans ce champ en complète mouvance.

     

     

     

    -C'est bizarre !... dit-il,les deux mains capées sur ses hanches.

     

     

     

    -Pourquoi bizarre ? réplique Richard

     

     

     

    -On devrait voir un promontoire...là...derrière...et il n'y en a pas !!!.....

     

     

     

    -Fait voir la carte, Chris.....

     

     

     

    Carte posée sur le sol, agenouillés, les deux hommes pointèrent le doigt sur le chemin parcouru. Au bout d'un instant....Richard..

     

     

     

    -Nous sommes arrivés en fin de matinée...le soleil était à 3 heures...nous avons progressé durant une heure trois quart...le soleil devrait donc se trouver là...

     

     

     

    et Richard de désigner un point situé sur sa droite et de conclure...

     

     

     

    -nous avons dérivé de 30° par rapport à l'axe de déclinaison du soleil....attends !...oui....il devrait y avoir un plateau...là ! Et je n'en vois pas à l'horizon ?!?!

     

     

     

    -Richard !....

     

     

     

    -Pas le moindre monticule...répètait Richard, éludant l'appel de Chris

     

     

     

    -Richard !!!! s'écria à nouveau Chris....

     

     

     

    Mai lui secoua la manche, attirant son attention.

     

     

     

    -Chris t'appelle...mamour !

     

     

     

    -Je crois que j'ai fait une énorme bêtise, Richard....Nous nous sommes trompés d'île....nous ne sommes pas sur la bonne !...la bonne est à côté ! Regardes ! Nous sommes ICI !!!!!!

     

     

     

    Chris mit le doigt sur un point de la carte et s'écria aussitôt.....

     

     

     

    -Seigneur !!! volte face les filles...on reprend le chemin inverse....et EN VITESSE !!!!!! nous sommes sur Komodo !

     

     

     

    Déjà, le bruissement faucheur des hautes herbes, les sillons laissés par des dragons prédateurs attirés par les paroles de retraite lancées bruyamment et à la hâte achevèrent de convaincre tout le petit groupe à déguerpir prestement...

     

     

     

     

     

    A mesure qu'ils regagnaient le couloir de végétation taillé par Chris, Richard percevait derrière lui le craquement des branches laissées sur le sol par la machette...il frissonna instinctivement.

     

     

     

    Chris taillait la route, les filles derrière et Richard en queue, se retournant de temps en temps, s'attendant à voir le museau antédiluvien d'un monstre affamé......

     

     

     

    Arrivés à la plage après quelques minutes qui semblèrent des heures, tout le groupe s'arrêta soudain..interdit...

     

     

     

    Un varan énorme s'avançait sur la plage, ondulant pesamment,

    quittant le lieu où le dinghy avait été laissé. A voir la multitude de morceaux qui jonchaient le sable, la bête s'en était donné à cœur joie.......Au loin, le voilier brassé par les vagues, attendait patiemment leur retour.

     

     

     

    -les filles...chuchota Richard...il va falloir nager mais nous ne pourrons le faire que cachés derrière ces gros rochers. La raison est simple. Ces animaux sont d'excellents nageurs...il va falloir nager sous l'eau, faire vite et en douceur !...des questions ?

     

     

     

    -Des tas ! pestèrent les filles....si l'on s'en sort...il faudra que l'on ait une discussion...entre quatre yeux !

     

     

     

    A ce stade, Richard et Chris eurent une pensée commune...ils allaient regretter de n'avoir pas préféré s'attaquer aux monstres !

     

     

     

    A pas de loup, ils gagnèrent sans problème le refuge rocheux qui allait favoriser leur retour en semi-sécurité. La bête n'avait pas bougé d'un iota, le nez pointé vers l'autre côté de l'île,

     

     

     

    Quelques instants plus tard, Richard donna le signal du départ....la main sur le manche de son long couteau....en cas !

     

     

     

    -PRETS ? ...alors, allons-y !!

     

     

     

    et ils se laissèrent couler d'un même élan dans le chenal......

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


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    Juillet...août...l'été des grandes vacances, des plages surpeuplées avec son étalage de chairs à moitié nues, parfois agréables, parfois adipeuses, dégoulinantes de protection solaire bon marché où se collent sable et macrocosme de toute nature....pas vraiment du goût de Mai et Richard même si la petite Jade s'amusait comme une folle. Cependant, ils n'avaient pas le choix. Moon et Chris leur avaient donné rendez-vous sur cette plage en début d'après midi pour discuter d'un projet de voyage hors des sentiers battus dont ils avaient le secret.

     

     

     

    Treize heures. Le soleil était au zénith et il commençait à faire terriblement chaud. Le sable était brûlant. Jade barbotait près du rivage dans l'eau à peine froide sous le regard attentif de ses parents. En élargissant le regard, on pouvait apercevoir des bateaux de plaisance ancrés au large derrière la barrière de récifs. Quelques baigneurs téméraires faisaient l'aller-retour jusqu'à la plate-forme placée à cent mètres sans se soucier de la présence éventuelle de squales qui s'enhardissaient jusqu'à la rive à cette époque de l'année.

     

     

     

    Venant du large, un léger vent de mer caressait leur visage d'impulsions légères et iodées, ce qui compensait l'attente forcée en plein soleil.

     

     

     

    Au détour d'une tour de garde, le couple apparut enfin, faisant crisser l'arénite d'une démarche souple et nonchalante.

     

     

     

    Moon avait revêtu pour l'occasion un deux pièces décent d'une immaculée blancheur faisant ressortir l'anatomie parfaite de son corps et le hâle eurasien de sa peau. Quant à Chris, comme à son habitude, il avait enfilé, sûrement à la hâte, un large short kaki de coupe anglaise qui descendait jusqu'au genoux, surmonté d'une chemisette hawaïenne aux tons criards, ce qui constituait un ensemble kitch... pas vraiment discret...Heureusement, les quelques mâles qui peuplaient la plage n'avaient d'yeux que pour la ravissante Moon, délaissant définitivement l'image un peu clownesque de son compagnon ; ils n'étaient pas les seuls....Mai et Richard, à cette apparition, ne purent s'empêcher de pouffer de rire.

     

     

     

    Richard entérina...

     

     

     

    -Toujours aussi discret...frangin !!!

     

     

     

    Chris maugréa quelques mots et à l'attention des regards qui le dévisageaient s'empressa d'effectuer quelques pas de danse façon Baloo que n'eut pas dédaigné un certain bonobo facétieux et lubrique de ses ancêtres cousins.

     

     

     

    A la vue de Moon et de Chris, Jade sortit de l'eau et ignorant la brûlure du sable sous son jeune épiderme, s'empressa de se jeter dans leurs bras en criant « Moucrisss ».... une façon bien à elle de

     

    rapprocher leurs prénoms sans avoir à reprendre son souffle...Futée et..pas bête !

     

     

     

    Richard aborda le sujet, d'emblée.

     

     

     

    -Alors...Chris...dis moi tout !

     

     

     

    -Tu ne vas pas me croire...Richard, mais j'ai trouvé notre prochaine destination....

     

    Il marqua un temps d'arrêt, tira sur sa chemisette. Il savait que laisser sa phrase en suspens trop longtemps agaçait son frère et souvent ce dernier partait au quart de tour en élucubrations orales dignes du capitaine Haddock. Ça l'amusait....il poussa le bouchon...

     

     

     

    -Tu as raison....il fait vraiment chaud...combien d'après toi ?

     

     

     

    -Je ne sais pas....38 ou 40 je crois mais...bon sang !...continues !....

     

     

     

    Richard commençait à s'impatienter. Chris le voyait lorsqu'il perdait patience..une veine frontale qui se gonflait au point d'exploser. Il arrêta le manège et reprit :

     

     

     

    -Tout doux, Richard...J'ai apporté une carte....attends...

     

     

     

    il sortit d'une poche latérale de son short, un dépliant qu'il étala sur le sable brûlant et pointant le doigt sur un coin de celle-ci désigna l'endroit de leur prochaine exploration.

     

     

     

    Richard se gratta la tête et regarda son frère.

     

     

     

    -Tu n'es pas sérieux... ?

     

     

     

    -Si....très sérieux. Ce coin est pratiquement inexploré et d'après mes sources, une hypothétique cité construite sur le modèle des cités précolombiennes serait encore recouverte par la jungle. Je sais...c'est une hypothèse émise par un naturel du coin de mes amis et plutôt fiable, ....il n'y a pas de fumée sans feu...que dis-tu de cela ?

     

     

     

     

     

    -Trois choses.... répondit Richard...et d'une...je ne peux pas amener Jade dans cette jungle, elle n'a que neuf ans...c'est du suicide....pas question....et deux, nous allons entrer dans cette fournaise humide sous la foi d'une hypothétique et ancienne cité qui doit être totalement submergé par la végétation depuis plus de mille ans.... si elle existe ! et trois....c'est totalement dingue....MAIS je marche. Restes à en parler aux femmes mais je pense qu'il n'y aura pas de problèmes à posteriori...seul hic...et de taille. Où et à qui allons nous laisser ma jolie fleur de lotus ?

     

     

     

    Pendant ce temps, Mai et Moon avaient terminé de parler chiffons et s'invitèrent à leur conversation....

     

     

     

    -Alors, les hommes....qu'avez vous manigancé ? Et où allons nous ?... S'écrièrent-elles, unanimes.

     

     

     

    -Nous nous sommes mis d'accord avec Richard commença Chris en pointant le doigt sur le dépliant...nous allons Là !

     

     

     

    Elles s'approchèrent et poussèrent un cri de stupeur.

     

     

     

    Une île vaste s'étalait sous leurs yeux ébahis

     

     

     

    -Vous êtes fous !...et dangereux....les hommes s'écria Mai

     

     

     

    Moon se contenta de dire...

     

     

     

    -Cinglés !...ils sont cinglés !....pas question !..nos hommes sont dégénérés ! nous avons des mâles dégénérés...grande soeur !

     

     

     

    Puis, elles s'éloignèrent vers les véhicules en emmenant Jade...L'enfant se retournait souvent car elle ne comprenait pas pourquoi elles étaient en colère et partaient sans eux.

     

     

     

    Richard et Chris les regardèrent s'éloigner puis ils s'allongèrent sur le sable brûlant sans un mot. Au bout d'un instant, Chris sortit un chewing-gum de sa poche, le mit dans sa bouche, regarda son frère et dit :

     

     

     

    -On s'en tire pas trop mal....frangin ! Ç’aurait pu être pire ! Tu ne crois pas ?

     

     

     

    La réponse du reporter fut rapide.

     

     

     

    -Affirmatif....frérot....affirmatif... et il tira le bord de sa casquette sur ses yeux en lâchant dans un soupir :

     

     

     

    ....vrai frangin..pire...mais y a pas à dire...elles ont raison...ON EST CINGLES !

     

     

     

    -Ouais !...on a intérêt à assurer !

     

     

     

    Et tous deux partirent d'un rire qui sonnait faux et qui cachait sans nul doute une tonne d'appréhension......

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    L'été de la peur 3

     

     

     

    Nous abordons l'archipel par vent de travers, un ris dans la grand voile. Le croiseur frappe l'écume. Le cap est encore invisible sous l'horizon et malgré une légère déclinaison du compas, nous sommes sur la bonne route. La mer change de ton, prend l'aspect d'une muraille d'un bleu foncé dans laquelle nous plongeons jusqu'à nous laisser porter dans une eau plus calme. L'après midi est bien entamée. Le Fulmar flotte maintenant sur une mer aussi plate qu'une paume de main, tirant des bords à travers un chapelet d'îlots d'aspect hostiles, recouverts d'une végétation verte, touffue mais remplie de chants d'oiseaux.

     

     

     

    L'île qui nous intéresse apparaît bientôt au détour d'un chenal. A sa seule vue, les filles appuyées sur le pataras frissonnent. Aucun son n'en sort. Pas le moindre signe de vie. Atmosphère troublante...angoissante perspective d'intrusion dans une végétation aussi dense que lugubre...Chris et Richard se regardent, le visage grave et après une seconde d'appréhension vite refrénée jettent l'ancre à quelques encablures d'une crique sablonneuse. Ils sont arrivés....autant continuer...pensent-ils.

     

     

     

    Mai a soudain une pensée pour Jade...dans quelle galère, les hommes allaient-ils les emmener ? Moon a reculé jusqu'au grand mât...elle ne sent pas cette aventure. Elle semble tétanisée, a du mal à respirer tant l'angoisse qui l'étreint la paralyse. Chris, la voyant si pâle, lui parle à l'oreille doucement, la rassure mais son regard ne fait pas de doute, il lui faudra du temps.....ou peut-être pas....

     

     

     

     

     

     

     

     


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    Aujourd'hui est un jour triste pour votre serviteur...Maman s'en est allée..vers le Paradis blanc. Elle est partie dans un souffle, sans douleur, a suivi le trajet du vent qui s'était infiltré dès proton minet dans la chambre afin de la séduire...J'ai bien essayé de la retenir mais son empreinte fugace a dénoué ma main pour suivre son doux ravisseur...me laissant seul face à sa chère enveloppe...

    Perdre une maman, quelle que soit la relation que l'on entretenait avec elle, est une chose terrible....Elle vous donne la vie et, en retour, on est incapable de la protéger de la Camarde...

    On voudrait la conserver...le temps de sa propre existence et partir...ensemble...

    Lamartine disait, je cite....un seul être vous manque, et tout est dépeuplé ...mais comment s'arrêter à cette seule phrase lorsqu'il s'agit d'une mère à qui l'on doit la Vie. C'est tellement impersonnel...quelque peu sibyllin... Nous serions bien ingrats de penser qu'après tout...ce n'est pas grand chose....

    Je ne vais pas m'étendre sur ce sujet...la Mort n'aime pas les philosophes... mais je vais seulement citer une magnifique prière amérindienne....

     

     

    « Quand je ne serai plus là, lâchez-moi !
    Laissez-moi partir
    Car j’ai tellement de choses à faire et à voir !
    Ne pleurez pas en pensant à moi !
    Soyez reconnaissants pour les belles années
    Pendant lesquelles je vous ai donné mon amour !
    Vous ne pouvez que deviner
    Le bonheur que vous m’avez apporté !
    Je vous remercie pour l’amour que chacun m’a démontré !
    Maintenant, il est temps pour moi de voyager seule.
    Pendant un court moment vous pouvez avoir de la peine.
    La confiance vous apportera réconfort et consolation.
    Nous ne serons séparés que pour quelques temps !
    Laissez les souvenirs apaiser votre douleur !
    Je ne suis pas loin et et la vie continue !
    Si vous en avez besoin, appelez-moi et je viendrai !
    Même si vous ne pouvez me voir ou me toucher, je serais là,
    Et si vous écoutez votre cœur, vous sentirez clairement
    La douceur de l’amour que j’apporterai !
    Quand il sera temps pour vous de partir,
    Je serai là pour vous accueillir,
    Absente de mon corps, présente avec Dieu !
    N’allez pas sur ma tombe pour pleurer !
    Je ne suis pas là, je ne dors pas !
    Je suis les mille vents qui soufflent,
    Je suis le scintillement des cristaux de neige,
    Je suis la lumière qui traverse les champs de blé,
    Je suis la douce pluie d’automne,
    Je suis l’éveil des oiseaux dans le calme du matin,
    Je suis l’étoile qui brille dans la nuit !

                N’allez pas sur ma tombe pour pleurer
                 Je ne suis pas là, je ne suis pas morte. »

     

    ChrisDaniels21

     

     

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    Voyage à l'intérieur d'une poche

     

     

     

    Je suis née d'un fil de soie et d'une aiguille. Ma marraine, une cousette, m'a donné le jour un soir d'automne...je sens encore l'estoc de la pointe qui tranche, glisse de bord en bord et me retient prisonnière de ma naissance.

     

     

     

    J'ai beau crier mais personne ne m'entend ; c'est vrai que j'ai du mal à m'ouvrir à l'extérieur car je suis toute aplatie, arrosée et brûlée par l'empreinte d'un fer...qui n'est pas de mes amis puis bien pliée sur un meuble bien frais. J'ai entendu ma cousette dire que c'est pour l'enfant de la maison, pour aller à l'école...

     

     

     

    je vais pouvoir apprendre....

     

     

     

    et j'ai appris beaucoup de choses ; j'ai appris que je n'étais pas seule. J'ai côtoyé des grandes, des petites, des grossières ou des raffinées, des étroites ou des tordues et même je me suis aperçu qu'il y en avait avec un nom...ou un dessin...cousu de fil d'or ou de coton de toutes les couleurs.... mais ces dernières n'étaient pas très sympathiques et me regardaient de haut alors que je les dévisageais.

     

     

     

    Lorsque arriva le grand matin, je partis plein de joie bien que le visage de ma maîtresse soit d'une humeur tout autre. je découvris l'extérieur et le monde des bipèdes avec leurs machines multicolores, bruyantes, asphyxiantes, aux odeurs nauséabondes...

     

    Mon amie s'appelle Sophie et elle est déjà grande. Elle est blonde, jolie et, de ce fait elle a beaucoup d'amies. Parfois, lorsqu'il fait froid, je sens ses mains qui se glissent à l'intérieur de moi. Je la réchauffe un bref instant puis elle ressort laissant l'empreinte de sa main et son parfum sucré, agréable et léger....Le soir, en rentrant, elle me dépose sur une chaise, nonchalamment. Je suis toute froissée jusqu'au matin d'après...

     

     

     

    Une fois par semaine, j'ai droit au bain, comprimée, tassée parmi d'autres linges aux odeurs douteuses, brassée de jets brûlants de longues minutes, ne plus rien sentir jusqu'au déferlement apaisant d'un tsunami glacé, envahissant de senteurs vanillées..., un raz de marée qui disparaît bientôt...jusqu'à la dernière goutte.....Enfin, tout ce bruit incessant qui s'arrête faisant place à un silence monacal qui nous accompagne accrochés à un fil tendu, baignés, séchés par les rayons d'un soleil bienfaiteur et puissant......jusqu'au soir et même plus...les jours de pluie entre les quatre murs d'une salle de bains.

     

     

     

    Les jours d'examens, j'ai droit à mon éducation. Sophie me glisse dés la veille de minuscules bouts de papier remplis de formules mathématiques...elle s'en débarrasse car je sais qu'elle n'aime pas cette discipline....c'est tout pour moi...jusqu'à ce qu'elle me les reprenne, dans le silence d'une classe studieuse, sous l’œil attentif, inquisiteur de son maître. Je me demande pourquoi.....Ça n'a pas d'importance, j'ai eu le temps d'apprendre....

     

     

     

    Les années ont passé, ma jeune maîtresse a grandi. Elle ne met plus ses mains en moi car je suis, je le sais, usée, fatiguée, rapiécée. Je sens toutes sortes de choses maintenant jusqu'à la plus désagréable, une odeur de fumée à la fois âcre et doucereuse qui parfois, la fait tousser...une odeur peu sympathique qui s' incruste en moi et me fait voir des choses...pas très nettes, déroutantes.

     

     

     

    Un soir, alors que j'avais réintégré depuis des mois le tiroir habituel saturé de naphtaline, impatiente de revoir Sophie partie un an auparavant à l'Université, sa maman est venue dans sa chambre et fait le tri dans ses affaires. Elle semblait bouleversée, au bord de l'effondrement, avec des larmes plein les yeux, rougis d'avoir trop pleuré. Elle a vidé les tiroirs, nous a mis dans un grand carton et fermé l'ouverture.

    Je ne comprenais pas...Que se passait-il ?

     

    Étouffée entre un chemisier qui sentait encore le parfum de Sophie et un pantalon rugueux, déchiré, j'ai glissé un regard à travers un trou de papier pendant qu'on nous emportait vers un coin du grenier. …

     

     

     

    C'est là que j'ai compris...en voyant le portrait de ma petite maîtresse cerclée d'un bandeau noir sur le dessus de la cheminée du salon...et

     

    ... la tristesse s'est emparée de moi..

     

    ...une goutte a coulé...un reste d'humidité conservée...pour la fin.

     

     

     

    Je ne verrais plus Sophie...mon amie de toujours...et savez vous pourquoi ?

     

     

     

    ...rappelez vous......grâce à Elle...

     

     

     

    j'ai beaucoup appris...en allant à l'école....AVANT !

     

     

     

     

     


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